Installé dans un petit motel en plein centre, ma chambre était un espace de 4 m2 avec une fenêtre qui donnait
sur une station de métro et la route en contrebas. Je dormais à même le sol sur des futons, ma chambre ressemblait davantage à un container qu’à un cocon. Je vivais principalement la nuit, toutes ces lumières et ces insignes publicitaires brillaient de mille feux lorsque le jour tombait.
Durant toute la durée de mon séjour sur place, j’ai shooté à l’argentique ; les temples, les gens, les lumières et les enseignes de la ville d’Osaka, essentiellement de nuit, car c’est à cet instant que la ville s’éveillait à mon sens.
Une fois en France, j’ai décidé de garder cette pellicule dans mon frigo sans la développer, sans vraiment savoir pourquoi, comme un trésor nécessitant un temps de réflexion.
Quatre ans après, lors d’une discussion autour de cette fameuse pellicule avec mon ami Robin Ressayre, comme moi, jeune photographe autodidacte passionné de voyages et d’argentique ; je décide de lui transmettre ce film afin qu’il photographie par-dessus.
Lui étant en voyage à Biarritz, il nous a semblé évident que cette pellicule devait être reshootée dans la région, toujours autour du sujet de la lumière afin de garder un lien avec Osaka.
Voilà donc l’idée de la double exposition aux couchers de soleil qui prend vie.
Nous voulions créer des images subversives et surréalistes, donner du sens à la réputation du Japon, «pays du soleil levant».
Les couleurs des sunsets sur le pays basque donnent parfois des tonalités extraordinaires, des peintures vivantes. Tout comme les différentes scènes que j’avais alors shootées à Osaka. C’est ainsi que notre projet en commun
eut du sens à nos yeux. Lorsque la nuit tombe et les lumières naturelles s’évanouissent ; place aux lumières artifcielles et criardes.
Ce projet en collaboration nous tient d’autant plus à cœur qu’il a été fait de manière totalement expérimentale. Cette pellicule endormie nous a donné des résultats qui nous ont énormément émus, et quelle plus belle façon que de raconter un voyage qu’à travers des souvenirs qui se superposent, de deux perceptions différentes.